SCHAPPACHER R., Dieu ne me demande pas mon CV, Nouan-le-Fuzelier, éd. des Béatitudes, 2010, 93 p., dans NRT 134/1 (2012) 158.
Le titre est bien « trouvé » et donne le ton du livre. Faudrait-il mériter l'amour de Dieu ? Existe-t-il des situations, des actes, des idées qui nous mettraient de manière irrémédiable en dehors de la puissance de sa miséricorde ? « Si ton père et ta mère t'abandonnent, moi je ne te laisserai pas » (Ps 27,14). Ce frère dominicain, longtemps visiteur de prisons, a aussi une expérience de retraites de guérison intérieure. Il nous assure que, pardonnés devant Dieu, il nous faut dépasser notre propre regard sur nous-mêmes. Personne n'est irrécupérable. La tolérance zéro ou l'ecclésialement « correct » ne peuvent pas signifier une stérilité de la miséricorde divine dans l'histoire humaine.
Comment nous en convaincre sinon en relisant la manière dont Dieu exprime sa compassion (I) dans l'histoire et son amitié pour les hommes : de la bénédiction de Caïn au vêtement de gloire de l'innocence, Dieu fait toutes choses nouvelles en son Christ. Il se laisse toucher par ce que je suis (II) : ce passage est d'une grande humanité ! Car rien n'est jamais perdu (III) : l'espérance y est rendu à travers des situations difficiles. La patience obtient tout et nous n'avons pas à rester dans nos tombeaux. Car si Dieu nous revêt de miséricorde, c'est pour nous « interdire » de nous juger nous-mêmes, mais nous laisser revêtir de la tunique du Christ, l'unique juste et innocent. Ce livre est plein d'élan : il ouvre les horizons et les cœurs. Il est inspiré d'une belle retraite prêchée et garde certaines images et expressions fort heureuses pour le lecteur. Il atteste combien la Miséricorde divine est « effective, dynamique, guérissante, transformante » (p.11). Elle va souvent à l'encontre du « monde », d'un monde qui se défend de cet amour par la multiplication des lois et de la violence en son sein. La seule performance qui compte ne serait-elle pas celle de l'amour ? « Pour se donner à nous, Dieu ne nous demande pas ce que nous avons été, il n'est touché que de ce que nous sommes » (citation du Père Lataste, 1832-1869).
P. A. Mattheeuws s.J.