Ce n'est pas un genre littéraire facile, mais il convient bien pour entrer, sans faire trop de théorie, dans l'expérience de « nos amis qui divorcent ». Par l'écriture nous accédons, pas à pas, à la vérité de cette situation douloureuse pour la comprendre et la porter en Christ. Le lien avec le sacrement de mariage sous-tend l'ensemble des questions et des réponses. Ce livre est limpide : il ouvre les cœurs à la souffrance, au respect, aux enjeux d'une séparation et d'un divorce. Il n'induit ni jugement ni banalisation des décisions prises par les uns et les autres.
Maxime et Axelle se sont mariés sacramentellement et ont trois enfants. Les tensions s'accumulent et le divorce se conclut. Thierry Maucour, ami du père de Maxime, dialogue avec ce dernier. Et celui-ci choisit de ne pas se remettre en ménage. Mais les questions restent, se développent et attendent une réponse libre de l'époux et père qu'est Maxime. Par ailleurs, Axelle a la garde des enfants et vit une grande solitude. Elle dialogue avec sa témoin Marie-Pierre. Elle lui expose son désir de se remarier. Ensemble, elles affrontent les questions ecclésiales et spirituelles que cela suppose. Pourquoi une telle sévérité de l'Eglise ? Que dit Dieu et que fait-Il encore ? Quels sacrements puis-je vivre ?
Un chassé-croisé de lettres nous permet à la fois d'entrer dans les sentiments des auteurs et de comprendre à chaque étape les enjeux de la liberté et de l'amour humain dans des histoires concrètes imprégnées de larmes et de douleurs. Ces faits de vie et ces « dialogues » d'amis et de chrétiens ne sont pas formels ni stylisés. Ils expriment bien les enjeux de la fidélité de l'amour : celui de Dieu, celui des époux, celui des enfants de ces familles.
Ces dialogues d'amis sont éclairants. Ils nous indiquent que l'amour, à toutes ses étapes, a besoin d'une altérité. Et le couple également : aux bons moments et aux heures de crise, le face à face des époux, s'il est incontournable, ne peut pas refuser la présence d'un tiers. Que ce tiers soit un ami, un familier, un prêtre, un conseiller conjugal, il est décisif pour prendre la mesure des décisions prises ou à prendre. L'existence de cette altérité ouvre toujours un avenir. La place et la mission des amis sont irremplaçables pour la vérité relationnelle des époux et pour leur croissance spirituelle, pour dénouer certains nœuds personnels et conjugaux. « D'emblée nous savons que ce regard est un regard d'amitié. Plus encore, d'affection, plus encore, de compassion ; plus encore, d'intercession », dit Mgr J.-P. Batut dans sa préface. L'amitié attestée en ces lettres échangées, est un bienfait ecclésial.
Retenons trois évidences : seul Dieu peut réparer « pour nous ce que nous ne pouvons pas réparer nous-mêmes. Dieu répond toujours à notre confiance » (p.92). Par ailleurs, la présence des enfants et certains événements de la vie sont et restent des occasions de vivre un temps de paix « non pas exactement comme avant », mais comme signe d'un respect qui dépassent les relations entre divorcés. Finalement, ce qui unit encore ceux qui se sont quittés, c'est à la fois la présence du Christ qui porte tout vrai mariage jusqu'à la fin de l'histoire humaine et la présence, la croissance et l'éducation des enfants qui sont toujours fils, filles de l'un et de l'autre. Les deux dernières lettres, celles des enfants à leurs parents, témoignent de cette vérité : elles sont la belle et vraie conclusion du livre.
Alain Mattheeuws s.J.