Homélie du 7 mai 2023 : Ac 6,1-7 ; Ps 32,1-19 ; 1 P 2,4-9 ; Jn 14-1-12.
La parole de Dieu nous éclaire particulièrement sur le mystère de la Trinité avant que Jésus lui-même ne monte au Ciel (l'Ascension) et nous envoie son Esprit (Pentecôte). En général, les lectures du dimanche nous aident à prendre conscience de cette merveille qu'est la révélation de Dieu par lui-même et la consistance également des grandes fêtes liturgiques de l'année.
Dans sa lettre aujourd'hui, Pierre nous invite à nous approcher du Seigneur Jésus : il désire que nous fondions notre demeure spirituelle sur sa personne. Jésus est la pierre vivante : il est le fondement de nos vies. Il lui donne assurance, solidité, vie. Jésus lui-même n'a-t-il pas dit : « Je suis le chemin, la vérité et la vie ». Comment connaître le Père sinon par le Fils, par ce visage à la fois humain et divin qui a fait sa demeure parmi les hommes ? Jésus, dit saint Pierre, accomplit l'œuvre du Père : « je vais poser en Sion une pierre angulaire, une pierre choisie, précieuse : celui qui met en elle sa foi ne saurait connaître la honte ». La pierre est comme l'image de la porte des brebis dans l'évangile de Jean : elle désigne Jésus et nous dit quelque chose de la mission du Christ. La pierre est le début d'une construction. Cette pierre qu'est le Christ est unique : il ne faut pas en chercher d'autres. Il faut commencer la construction avec elle et se joindre à elle. Il faut bâtir nos vies sur elle. D'ailleurs, cette pierre angulaire ne désire pas être seule : elle nous invite à entrer dans cette demeure spirituelle et éternelle qu'elle inaugure sur la terre. Magnifique nouveauté ! Assurance que nous sommes avec Dieu, que nous ne sommes pas dans l'illusion et que nous ne construisons pas une nouvelle tour de Babel. Cette pierre qu'est le Christ est précieuse : elle est irremplaçable. Où est-elle dans notre vie ? Comment se manifeste-t-elle ? Un bref effort de mémoire pourrait nous aider à désigner le Christ comme centre de nos vies et de nos activités.
Où sommes-nous engagés comme croyants ? Car nous aussi, dit saint Pierre, sommes appelés à être des pierres vivantes dans cet édifice spirituel en écoutant la Parole. La description que fait Pierre de notre réalité commune et cette Eglise que nous formons est à la fois symbolique et belle : il est bon de l'écouter et d'en recevoir une bonne dose d'encouragement : « Mais, vous, vous êtes une descendance choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple destiné au salut ». Être en Christ, être revêtu du Christ, appartenir à la même demeure, est une source de bonheur et de joie. C'est également une mission ; annoncer « les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière ».
L'évangile nous engage plus profondément dans la parole de Jésus lui-même qui prépare son proche départ : « je vais vous préparer une place ». Le suivre, c'est aller comme Lui vers le Père. « Personne ne va vers le Père sans passer par moi » car « Jésus est le Chemin, la Vérité et la Vie ». Sa personne nous met en contact avec le Père. L'aimer et Le suivre, c'est aller vers le Père. Nous sommes bien là devant deux personnes distinctes mais qui sont dans une telle communion, sans fusion, que connaître l'une c'est connaître l'autre par l'œuvre de l'Esprit de Jésus. Cette première approche de la Trinité est riche et désarçonnante : nous n'en avons pas souvent l'expérience, mais la foi en Jésus nous mène vers ce mystère de communion trinitaire. Si Jésus s'en va vers le Père, ce n'est pas pour nous abandonner, mais pour envoyer son Esprit qui nous gardera conjoints à Lui et au Père.
« Je suis dans le Père et le Père est en moi ». Voilà la formule dense que Jésus emploie pour nous faire entrer dans ce mystère divin. Ces deux sujets sont distincts mais tellement unis par l'amour que jamais l'un n'est sans l'autre : toute parole de Jésus nous dit la volonté de son père. Toute parole de Jésus nous est murmurée par son Esprit dans notre esprit et notre cœur. Être une pierre vivante, ce n'est pas être dur ni fossilisé. Le paradoxe, c'est que la pierre vivante est souple : elle écoute et vit au rythme du cœur de Dieu. Elle appartient à l'unique demeure spirituelle à laquelle nous appartenons tous : toutes les pierres vivantes sont importantes pour l'édification de cette « belle maison de Dieu » où tous ensemble, nous faisons un même corps. Toutes ces images cherchent à décrire, à cerner, à comprendre une réalité qui nous dépasse et dans laquelle pourtant nous sommes plongés particulièrement dès notre baptême : la demeure qu'est l'Eglise pour chacun d'entre nous. Si cela nous dépasse, c'est pour que nous entrions dans l'émerveillement et dans l'admiration : nous ne rêvons pas, mais nous voyons et nous croyons en Jésus qui est parmi nous par l'Esprit. Et ensemble, nous osons dire dans nos prières et dans l'eucharistie des mots qui surgissent du cœur de Jésus et qui s'adressent au Père. Quand nous prions ensemble le « Notre Père », nous sommes accordés dans la même demeure, dans le même langage, dans la même confiance en Dieu qui reste à la fois tout proche et très concret. Nous avons le même Père, nous dit Jésus. C'est pour cela que nous sommes tous frères et que nous vivons dans sa lumière. Aujourd'hui dans la lumière de Pâques et avec les paroles mêmes de Jésus, nous entrons plus profondément dans le mystère de notre Dieu : un seul Dieu en trois personnes qui nous aiment et nous entrainent à témoigner de Lui là où nous sommes.